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Vert paradis

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Note sur un expo à voir à Lucerne...

 

À La Désirade, ce dimanche 1er août. – Il y avait ce matin un ciel turquoise au-dessus des montagnes de Savoie bien détaillées dans les gris bleu et les vert tendre, où flottaient de petits nuages blancs qu’on aurait dit peints par Hodler vers 1906, à cela près qu’ils se sont bientôt  transformés et se reconstitués en longues bandes horizontales superposées, moins figuratives, annonçant en quelque sorte l’abstraction américaine des dernières années du peintre, vers 1914-1918… 

 Cette apparition m’a rappelé l’état de réceptivité extrême dans lequel je me suis retrouvé hier au Kunstmuseum de Lucerne où peut se voir, ces jours, une belle exposition consacrée à un trio de compères proches, à savoir Ferdinand Hodler précisément, Cuno Amiet et Giovanni Giacometti.

Hodler est évidemment hors catégorie ou écoles, même s’il touche au classicisme réaliste en ses débuts, au symbolisme et aux franges du fauvisme ou des nabis, puis à l’abstraction lyrique dans ses derniers paysage jamais « abstraits » au demeurant selon l’appellation conventionnelle, mais l’exposition très sélective que propose ici Christoph Lichtin établit bel et bien un lien de parenté entre trois coloristes helvètes qu’on sent proches aussi de la nouvelle peinture-peinture européenne et plus précisément française, du côté de Gauguin et des fauves, entre autres.

La première salle, toute dévolue à un choix haut de gamme de paysages d’Hodler, nous rince illico le regard : c’est un bain de jouvence voire de jouvencelle dans un lac vert tendre. La plus belle chose est d’ailleurs pile au fond de la salle avec un cadre excessivement doré-mouluré qu’on oublie : c’est ce lac de Brienz d’un vert très tendre qui évoque le vert très pâle, entre l’absinthe et le turquoise assourdi, littéralement serti dans un paysage structuré en vue de balcon dont le rebord du premier plan est un agreste haut gazon dégagé de toute pesanteur réaliste. Tout aussitôt cette couleur m’a suggéré l’adjectif : candide, associé au blanc qu’il y avait dans ce vert pour ainsi dire « innocent », comme un vert marial de source glaciaire épurée de son limon…

 

Lucerne. Kunsthaus. Hodler. Amiet. Giacometti. Jusqu'au 10 octobre.

 

PS. La repro ci-dessus, piquée en douce sur mon portable, ne vaut pas un clou. Le vert du lac est infiniment plus subtil et doux, et le reste du paysage plus finement et précisément dessiné. Bonne raison de faire le voyage de Lucerne...

 

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