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Contre la fausse parole


Les modes intellectuelles de la deuxième moitié du XXe siècle, avec leur foison de maîtres penseurs et autres gourous concélébrés de cafés en universités, ont complètement occulté certains penseurs de qualité, dont Louis Lavelle est l’un des plus beaux exemples. Ecrivain d’une haute spiritualité et d’un style admirable de fluidité et de claire profondeur, si l’on ose dire, Lavelle est de ces philosophes dont chaque page nous ramène au cœur de l’interrogation sur le mystère de l’être et le sens de la vie, dans une visée à la fois éthique et métaphysique. Des livres tels que L’intimité spirituelle, La conscience de soi ou, plus encore L’erreur de Narcisse, sont à redécouvrir dans leur fraîcheur persistante, au même titre que les ouvrages plus « techniques », tel l’excellent Panorama des doctrines philosophiques de celui qui tint la chaire de philo du Collège de France de 1941 à sa mort, en 1951.
L’idée de rééditer La parole et l’écriture, traitant notamment de la corruption du langage contemporain, est aussi louable qu’est pertinente la substantielle introduction de Philippe Perrot. Des données fondamentales du langage à sa modulation par la voix (le souffle, le pépiement de l’enfant, la perception du mot comparé à l’ouïe ou à la vue) et aux vertus, mais aussi aux apories de la parole, Louis Lavelle éclaire une fois de plus notre lanterne avec une tranquille sagesse.
Louis Lavelle. La parole et l’écriture. Le Félin/Poche, 222p

Commentaires

  • C'est toujours un plaisir et presque une émotion, de voir un hommage à Lavelle, comme à d'autres sa génération.
    Mais, je serai moins radical que vous. La seconde moitié du XXème aura au moins fait un très puissant dialecticien : Sartre. Je crois d'ailleurs que sur certains sujets (notamment les valeurs et le vécu), Lavelle est beaucoup plus fébrile. Lavelle n'arrive pas à penser autre chose que l'interiorité et ne pense l'action que comme spiritualité. L'humain est chez lui davantage un auteur qu'un "acteur" de ses actions... c'est cela qui me gene chez Lavelle. Et puis, il y a le choc des générations. Si vous pouvez trouver le bulletin de la séance de la société française de philo sur les Valeurs en 1945, vous aurez sous les yeux une dispute entre deux générations qui ne se comprennent plus. Il y a Polin (sorte de porte parole de la thèse sartrienne, très vif) et en face Lavelle (et ses copains... La Senne notamment), qui défend sa transcendance axiologique. Ce qui est marrant, c'est que les deux hommes ne parlent plus le même vocabulaire. On a la désagréable impression que Lavelle se fait démolir comme un château de carte... comme si l'on demandait à Aristote de répondre à Russell... ça vaut le détour!
    Mais je suis d'accord avec vous sur le dédain de la philosophie post 45 au sujet de la philosophie de l'entre-deux-guerres.

  • Merci pour ce mot et de me faire découvrir le museau de Lulu. La philo est votre job, tandis que je ne lis que les philosophes écrivains, surtout Merleau-Ponty depuis quelque temps. Mais Lavelle est d'un bel osier, et j'aime sa phrase jusqu'à un certain point d'évanescence spiritualisante... Quant à Sartre je ne sais pas, il faudrait que j'y revienne. J'aime beaucoup Les Mots mais le côté jobard idiot utile du militant m'a fait préférer avoir raison avec Aron que tort avec lui... Mais ça peut changer, n'est-ce pas ? Plus on va et plus le côté dérisoire de certaines certitudes se fait jour. Cela pour dire que je suis bien plus chez moi chez les artistes et ceux qui les comprennent, donc chez Léon Chestov ou Merleau ou Deleuze ou Jacques Ellul pour d'autres raisons, etc. Un bec à Lulu de celui que ses filles appelaient l'Ogre à Becs...

  • C'est justement ce côté militant de Sartre qui révulse souvent les français, alors que les étrangers sont séduits. Je trouve cela étrange.
    Et puis la philo n'est pas vraiment mon job (rires), dans dix ans ce sera un bon souvenir! La technique est interessante mais lassante, parce que froide et hermétique... Kant aurait pu consacrer 900 pages à la définition d'un tournevis : "De l'action du tournevis par l'entremise de nos doigts ou La condition a priori du tournevis en tant qu'outil"... (rires)... Ce côté inutilement pédagogue et presque ridicule est fatiguant et même dégoûtant... Alors je dis oui aux philosophes écrivains!

    à bientôt

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